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Du réchauffement climatique à l’investissement vert, tous les chemins mènent vers une croissance verte

La Tunisie est de plus en plus touchée par les conséquences du changement climatique. Selon les derniers chiffres, de toutes les sous-régions d’Afrique, c’est l’Afrique du Nord qui a connu le réchauffement le plus rapide, avec une augmentation moyenne d’environ 0,4 °C par décennie entre 1991 et 2023. Pour remédier à cela, il faut mesurer et atténuer l’émission des gaz à effet de serre. Si la notion de bilan carbone est le point de départ de ce processus d’atténuation, elle porte aussi un enjeu financier majeur pour la Tunisie.

Les projections des températures annuelles moyennes calculées en Tunisie (scénario RCP 4.5) montrent une nette augmentation aux horizons 2050 et 2100. Selon une étude de l’Institut National de Météorologie (INM), cette augmentation varie entre +1°C et +1.8°C à l’horizon 2050 et pouvant atteindre 2°C et 3°C quelques années plus tard.

Les impacts liés à l’augmentation des températures, à la baisse des précipitations et à la hausse du niveau de la mer sont de plus en plus visibles. Les répercussions socio-économiques et environnementaux touchent notamment les ressources en eau, l’agriculture, les écosystèmes naturels et artificiels, la santé et le tourisme.

Imed Thabet, consultant expert en énergie durable et changement climatique, précise que le danger pour la Tunisie concerne notamment la sécurité alimentaire “avec la baisse de la productivité de la terre agricole en raison de l’infiltration de l’eau marine dans l’eau d’irrigation et les fréquences des épisodes de sécheresse.”

Les scénarios d’adaptation peuvent apporter des solutions, dont le traitement des eaux usées pour irriguer l’agriculture, mais il est vital de concentrer nos efforts sur l’anticipation du point de non-retour, a-t-il dit.

Comment la Tunisie fait face à ce défi ?

Pour remédier à cette situation climatique au niveau mondial, l’ONU préconise une solution claire et rigoureuse sur l’axe de l’atténuation: l’élévation de la température mondiale doit être limitée à 1,5 °C par rapport aux niveaux préindustriels (période 1850-1900). Pour limiter le réchauffement de la planète à 1,5 °C, conformément à l’objectif de l’Accord de Paris,il convient de réduire les émissions de 45 % d’ici à 2030 et d’atteindre l’objectif zéro émission nette d’ici à 2050.

La Tunisie qui est signataire de l’accord de Paris, s’est proposée dans sa contribution Déterminée au niveau national (CDN), élaborée en 2015, de “réduire ses émissions deGaz à effet de serredans tous les secteurs (énergie, procédés industriels, agriculture, forêts et autres utilisations des terres, et déchets) de manièreà baisser son intensité carbone de 41% en 2030 par rapport à l’année de base 2010”.

L’effort d’atténuation proviendra plus particulièrement du secteur de l’énergie qui représente à lui seul 75% des réductions des émissions, sur les bases desquelles a été réalisée cette baisse de l’intensité.

Selon le ministère de l’environnement, “la mise en œuvre de ce programme nécessite la mobilisation d’importants moyens financiers estimés à environ18 milliards USDpour la couverture des besoins d’investissement et le financement des programmes de renforcement des capacités”.

Un challenge de taille quand on sait que la Tunisie s’est fixée des objectifs ambitieux dans le cadre de l’Accord de Paris sur le climat.

Dans sa stratégie nationale bas carbone, la Tunisie ambitionne d’atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050.

Des efforts sont à faire au niveau national, mais le secteur privé est aussi aux premiers rangs de cette aventure et devra effectuer la transformation nécessaire. Le changement climatique mobilise tous les acteurs pour que chacun joue son rôle, surtout quand le mouvement économique mondial dicte la feuille de route.

La taxe carbone, une nouvelle réalité

Les acteurs économiques devront investir dans la production énergétique propre ou dans l’efficacité énergétique afin de rester dans la courbe nationale d’atténuation.

Pour pouvoir atténuer, il est nécessaire de mesurer l’empreinte carbone et la prendre en compte comme élément comptable.

Selon les définitions fournies, «L’empreinte carbone est un indicateur qui vise àmesurer l’impact d’une activité sur l’environnement,et plus particulièrement les émissions de gaz à effet de serre liées à cette activité. Elle peut s’appliquer à une personne (selon son mode de vie), à des ménages, à une entreprise (selon ses activités), un territoire, ou encore à des produits».

Pour le cas des entreprises, toute activité de production génère un impact sur l’environnement selon la nature des produits.

En Tunisie, les briqueteries sont considérées comme les plus grands pollueurs atmosphériques en plus des unités de raffinage des grignons d’olive dans la région de Mahdia qui utilisent des produits chimiques dangereux.

Toutes ces activités devront revoir leur mode de production pour ne pas dépasser le plafond d’émission fixé par l’Etat. Une deuxième contrainte à l’évolution des législations mondiales sur le carbone est ajoutée au tableau. Car au-delà de l’aspect climatique, l’empreinte carbone est aussi un enjeu financier.

En effet l’application de la taxe carbone au niveau de l’Europe va se traduire par une charge qui affecte la compétitivité des entreprises tunisiennes exportatrices vers l’Union européenne. Les entreprises tunisiennes devront donc revoir leur stratégie d’investissement en prenant en compte la transition énergétique, les nouvelles technologies moins polluantes et surtout effectuer leur bilan carbone. Les importateurs européens vont choisir les produits qui ont le plus faible indice d’émission pour éviter de payer un surplus.

Une nouvelle législation fait débat en ce moment, le MACF « mécanisme d’ajustement du carbone aux frontières » qui va transformer le commerce international et impacter les industries non européennes qui souhaitent vendre sur le marché européen. Cette taxe est une réponse aux risques de «fuite de carbone» pour protéger ses industries contre une concurrence déloyale provenant de pays n’ayant de politiques similaires en tarification du carbone.

Le rôle de l’Etat est, donc, d’accompagner les entreprises tunisiennes pour investir dans leur transformation si elles veulent opérer avec les marchés européens.

Cet accompagnement peut se traduire, selon Mr Thabet, par “des subventions directes ou des mécanismes de facilitation de financement de transition énergétique ciblée ainsi que la diffusion du savoir-faire pour la maîtrise de l’évaluation du bilan carbone de leurs produits”.

Au delà du climat, un enjeu financier majeur

En plus des entreprises, il y a aussi une utilité pour la Tunisie de rejoindre la dynamique internationale en raison de l’orientation des flux financiers vers l’investissement vert.

Les bailleurs de fonds dirigent en effet leurs financements vers les projets qui font preuve d’un bon indice “green”. “Il est de l’intérêt des organismes d’emprunter ce schéma de performance environnementale et de se positionner sur ce marché.

La Banque centrale européenne (BCE) par exemple, a intégré les considérations climatiques dans sa politique monétaire, et exige des contreparties avec des normes vertes.

Mr Imed Thabet indique que “la Tunisie a tout à gagner en adoptant une taxonomie avec des seuils d’émissions définis qui vont aider à établir une vue globale de ce qui est considéré comme vert afin d’être dans la course au vu des investisseurs et profiter des opportunités offertes par la finance verte.”

La taxonomie verte est un outil qui définit les critères permettant d’identifier les activités économiques considérées comme durables sur le plan environnemental permettant ainsi aux entreprises d’avoir une grille d’analyse harmonisée pour orienter leurs investissements.

Face à des partenaires économiques de plus en plus exigeants sur le plan environnemental, la Tunisie doit repenser son modèle économique pour éviter des sanctions et préserver ses exportations vers l’Europe.

Le point de départ est le changement climatique qui devient un enjeu crucial, mais il n’est qu’un élément d’une dynamique mondiale plus globale qui s’est mise en état de marche. Les aspects climatiques, économiques et financiers sont désormais liés et pourront bientôt décider du chemin des investissements au niveau des pays et des organisations.

Par Hajer Almi

Ce travail a été réalisé en collaboration avec la Section-Tunisie de l’Union de la Presse Francophone